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Communiqué de la Libre pensée nationale

Emblèmes religieux à l’École publique : l’impasse législative et réglementaire…

Le Journal Officiel du 22 mai 2004 a publié la version finale de la circulaire d’application de la loi Chirac/Stasi du 15 mars 2004 portant sur l’interdiction de « la présence ostensible de signes religieux à l’École publique ». Loin de calmer les doutes de la Fédération nationale de la Libre Pensée, cette circulaire confirme ses plus grandes craintes quant au respect du principe de laïcité.

La Libre Pensée, qui est pour l’interdiction totale des croix, kippas, foulards islamiques, totems et autres gris-gris dans l’Ecole publique, réaffirme que la source du problème de la présence des signes, insignes et emblèmes religieux réside fondamentalement dans l’article 10 de la loi Jospin.

Approuvée par 26 voix sur 65 votants (8 voix contre, 6 abstentions et 25 refus de vote !) par le Conseil Supérieur de l’Education, cette circulaire n’est qu’une redite de celles traitant de la loi Jospin de juillet 1989. En matière de laïcité, nous n’avons affaire qu’à un copier/coller des circulaires du 12 décembre 1989, du 26 octobre 1993 et du 20 septembre 1994, élaborées après la jurisprudence du Conseil d’Etat sur l’article 10 de la loi Jospin (transposé comme article L.511.2 du Code de l’Education) traitant du « droit d’expression des élèves ».

En remplaçant le terme « d’ostentatoire » par la notion d’emblèmes « ostensibles », elle ne règle en rien le problème. La circulaire stipule que « la loi ne remet pas en cause le droit des élèves de porter des signes religieux discrets », alors que cette notion de discrétion est formellement interdite dans le même temps, à juste titre, pour le personnel de l’Education nationale, sauf en Alsace Moselle où les religieux de toutes natures pourront venir en soutane, avec croix et kippas faire leur cours de religion. Pourquoi deux poids, deux mesures ? Un emblème religieux reste un insigne religieux quelle que soit sa taille, sa couleur ou les arguties de celui ou de celle qui le porte ou la font porter. Et cela devrait être vrai pour les élèves comme pour les enseignants.

La notion de « croix de dimension excessive » est ubuesque. Outre que cette taille peut varier, selon les termes d’un journal vespéral, démocrate chrétien, en fonction de la taille des élèves et que cette définition aurait pu être un bon sujet de feu le certificat d’étude (comme la fuite de la baignoire, calculer la dimension excessive d’un emblème religieux en fonction de l’âge du capitaine), elle confirme la volonté antilaïque des tenants de l’adoption de cette loi.

En affirmant dans son premier chapitre (qui traite de la laïcité dans l’Ecole publique et non dans la société en général) que « l’État est le protecteur de l’exercice individuel et collectif de la liberté de conscience », le gouvernement institutionnalise le communautarisme. Il n’y a pas, il ne saurait y avoir de liberté de conscience autre qu’individuelle dans l’École publique, sinon c’est la reconnaissance des communautés organisées au sein de l’École de la République. Qu’est-ce qu’alors « une liberté de conscience collective », sinon un endoctrinement ? Dans l’Ecole publique et plus généralement dans les services publics et l’administration, la religion doit rester une affaire privée individuelle et non collective, sinon c’est la création de ghettos institutionnalisés.

En affirmant que « l’intolérance et les préjugés se nourrissent de l’ignorance, la laïcité suppose également une meilleure connaissance réciproque (entre qui et qui ? NDLR) y compris en matière de religion… Plus spécifiquement, les faits religieux… doivent être utilisés au mieux dans les enseignements pour apporter aux élèves les éléments de culture indispensables à la compréhension du monde contemporain ». C’est l’exigence ministérielle, continue sous tous les gouvernements de droite comme de gauche, de l’enseignement du « fait religieux ».

Oui mais, quand un professeur d’histoire, Louis Chagnon, dans un lycée de Courbevoie (Hauts-de-Seine) rappelle un fait barbare d’assassinats de centaines de juifs au moment de l’affirmation de l’Islam, ce qui est un fait historique et religieux, il est sanctionné pour racisme ! Nous sommes, dès lors, en droit de dire : quelle est la différence entre l’enseignement du fait religieux et l’apologie de la catéchèse religieuse ?

Les enseignants de l’École publique auront-ils encore le droit de parler de l’incendie de la Bibliothèque d’Alexandrie par des chrétiens ivres d’ignorance, des croisades fomentées par des prélats catholiques dont la haine contre l’Humanité différente le disputait à leur soif de pouvoir, de l’Inquisition étouffoir des pensées, de l’orthodoxie à la botte du tsarisme et du stalinisme, de l’Islam assassin des penseurs libres et oppresseur des femmes, du protestantisme apôtre du capitalisme, de l’hindouisme justificateur du système honteux des castes, du massacre organisé par l’Etat d’Israël du peuple palestinien ? On est en droit de se poser cette question à la lecture de cette circulaire.

Quand la circulaire indique explicitement que les élèves du privé (à 95% confessionnel) pourront venir passer « leur examen ou un concours « au sein de l’École publique sans que le principe d’interdiction des insignes, signes et emblèmes religieux ne leur soit appliqué, où est le principe du respect de laïcité ?

Cette circulaire se termine en son chapitre IV par l’exigence que le règlement intérieur traduise son interprétation par une formulation visant à l’application concrète de cette prohibition des emblèmes religieux portés par les élèves. C’est là que l’on ne comprend plus ou que l’on comprend trop bien. Un règlement intérieur n’a pas pour objet de rappeler les lois, il faudrait mille ouvrages pour cela. Il n’a pour seule raison que de définir ses propres règles de fonctionnement qui, par définition, sont susceptibles d’être différents d’un établissement à l’autre, d’aborder les points de la vie intérieure non prévus explicitement par les lois et non contradictoires avec elles. Sinon, il n’a aucun objet.

Cette indication ne peut entraîner qu’une conception et qu’une application différente dans chaque établissement. C’est la logique de la loi Jospin qui continue, laquelle prône « un projet pédagogique » particulier, sur le modèle du « caractère propre » de l’enseignement privé pour chaque établissement public.

On comprend donc pourquoi l’union nationale entre la droite et la gauche s’est faite pour ne pas toucher à la loi Jospin et particulièrement son article 10, qui est la source de tous les problèmes. Nous avons à faire à un véritable faux-semblant et à une diversion dangereuse, car elle a fait surgir tous les communautarismes destructeurs de l’unité de la République. On comprend aussi que, dans toute cette affaire, il n’a jamais été question d’abroger les lois antilaïques qui organisent le pillage des fonds de l’École publique au profit de l’enseignement essentiellement catholique. Pourtant, cela aurait été vraiment l’occasion de défendre l’École laïque !

Pour la défense de l’École publique :
Abrogation de la loi Jospin !
Abrogation des lois antilaïques !
Tous les fonds publics à la seule École publique !

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